Cette étude s’inscrit dans le cadre de la Campagne Citoyenne pour la Limitation des Mandats, qui vise à lutter contre les velléités de pouvoir de dirigeants africains qui briguent ou exercent plus de deux mandats présidentiels par le biais de changements constitutionnels et de processus électoraux viciés. Cette campagne panafricaine cherche à mobiliser les sociétés civiles africaines autour de la problématique des transitions démocratiques. La présente étude a été rédigée, à la demande de Tournons La Page (TLP), par le Réseau Africain de Droit Constitutionnel (RADC), association partenaire basée en Afrique du Sud, dont le travail porte sur le développement du constitutionnalisme et de la démocratie dans les pays africains. Elle est le résultat d’un travail de recherche et d’analyse de plusieurs mois des membres du RADC, comprenant des juges, des avocats, des universitaires, des activistes, des ONG, des instituts académiques et de recherche.
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Les développements politiques au sein de la CEDEAO montrent que les États membres de l’organisation sous régionale ont continué à être confrontés à la présence de gouvernements dirigés par des militaires. L'arrivée au pouvoir des militaires entrave les progrès démocratiques dans la plupart des États de la CEDEAO et menace la stabilité politique dans la région. Cette tendance démocratique défavorable est liée aux préoccupations concernant les réformes politiques qui ont remis en question la fiabilité, la légitimité et l'acceptabilité des élections dans les États membres. La mise en œuvre de certaines de ces réformes politiques/constitutionnelles a provoqué des crises qui ont conduit à la récurrence de coups d'État militaires. Les réformes récentes se sont concentrées sur les dispositions relatives à la Limitation du nombre de Mandats Présidentiels (LMP), qui visent à restreindre le nombre de mandats d'un président. Ces limites se sont répandues en Afrique dans les années 1990, lors de la troisième vague de démocratisation du continent. Il existait des LMP en Afrique avant les années 90, mais elles n'étaient pas très répandues et n'ont pas modifié la durée de facto du mandat présidentiel, les dirigeants africains restant au pouvoir deux fois plus longtemps que les dirigeants d'autres pays.
Toutefois, le recours récent des régimes autoritaires à la modification de ces limites pour prolonger leur présence au pouvoir est une cause urgente de préoccupation. Les recherches montrent qu'environ 16 pays ont modifié ou évité de limiter la durée du mandat de leurs présidents et qu'un bon nombre d'entre eux ont pris de telles mesures au cours des six dernières années. Cette préoccupation fait sans aucun doute partie des prémisses sur lesquelles le Parlement de la CEDEAO a appelé à l'amendement du Protocole sur la Démocratie et la Gouvernance.
Ce document d’orientation vise à éclairer les débats autour des amendements et à identifier les points d'entrée en attendant l'adoption des amendements au Protocole. Il examine le défi que représente la non-adhésion à la LMP et son impact sur la région de la CEDEAO. Il examine le rôle de la CEDEAO, les effets des récentes réformes politiques sur la démocratie et la stabilité et s'appuie sur des pratiques régionales et internationales comparatives pour traiter la question de la limitation des mandats. Des recommandations visant à renforcer les mécanismes de la CEDEAO pour protéger et promouvoir l'adhésion à la limitation des mandats présidentiels sont également proposées.