L’acteur de la société civile Ahmed Ekrou dit Korondi a été arrêté lundi 7 juin 2021 par la gendarmerie de Diffa suite à un audio fait dans le groupe WhatsApp du Comité de veille régional de Diffa où Korondi critique la gendarmerie de n’être pas suffisamment à la hauteur pour contrer les attaques terroristes.
En effet, le matin du samedi 05 Juin, des éléments de Boko Haram ont attaqué la position de la gendarmerie située au niveau de la Société Nigérienne des Produits Pétroliers, Sonidep-Diffa. Bien que le bilan de cette attaque ne fasse état d’aucune perte en vie humaine, les terroristes ont :
- Emporté puis détruit un véhicule de la gendarmerie ;
- Incendié deux (2) véhicules de la Sonidep ;
- Tiré sur un réservoir contenant du carburant.
Le lendemain vers 21h, les éléments de Boko Haram ont attaqué la position militaire du pont Doutchi à Diffa. L’attaque a heureusement été repoussée par les Forces de Défense et de Sécurité. C’est dans ce cadre que Korondi a tenu les propos suivants en langue Hausa :
"Nous ne voulons plus de gendarmes dans la région de Diffa. Ils ne font qu’occasionner de pertes à la population et au gouvernement. Comment est-ce qu’on peut laisser des terroristes venir jusqu’à la ville de Diffa, en journée et les laisser s’emparer de groupe électrogène. Toute la ville de Diffa aurait pris feu (à cause des produits hautement inflammables de la Sonidep). Il y a quelques jours de cela, à Mainé Soroa, j’ai vu les gendarmes avec presque 17 véhicules vers 7h du matin. Mais dès le crépuscule ils se retirent de la ville. S’ils rencontrent des éleveurs, ils leur affligent de traitements inhumains et dégradants. Lorsque je suis parti me renseigner là-dessus, on m’a répondu que c’est une tactique de guerre. À Diffa, parmi toutes les forces de défense et de sécurité, aucune n’a subi de perte de matériels militaires comme la gendarmerie lors des attaques terroristes. Les gendarmes occupent le terrain, mais ils sont concentrés sur WhatsApp qu’une personne peut passer sans qu’ils ne s’aperçoivent. Sur les routes ils ne contrôlent pas ce que les véhicules transportent. Mieux vaut laisser les gendarmes dans leur caserne et laisser les militaires gérer comme on le fait au Nigeria”.
Korondi a été d’abord arrêté par la gendarmerie en violation flagrante du principe qui empêche d’être juge et partie dans une même affaire. Après avoir été interrogé il a été transféré à la police judiciaire et présenté au juge qui la placé sous mandat de dépôt à la maison d’arrêt de Diffa. Il est poursuivi pour diffusion de données de nature à troubler l’ordre public ou à porter atteinte à la dignité humaine sur la base de l’article 31 de la loi portant répression de la cybercriminalité. S'il est reconnu coupable, il risque trois (3) ans de prison et cinq (5) million d’amende. Cette loi est écrite dans un langage plutôt vague et a déjà été utilisée de nombreuses fois par le gouvernement pour criminaliser la liberté d'expression au Niger.
De ce fait, TLP-Niger condamne l’utilisation abusive de la loi sur la cybercriminalité, la restriction des libertés publiques et la répression des acteurs de la société civile à cause de leur opinion et demande la modification de toutes les lois liberticides.
Aussi, TLP apporte son soutien à Korondi arrêté pour avoir exercé son droit constitutionnel, à la population de Diffa meurtrie par les attaques incessantes de Boko Haram et à celle de toutes les régions qui subissent, de plein fouet, les conséquences de l’état d’urgence.
Fait à Niamey le 10 juin 2021
Le coordinateur national
Maikoul Zodi