Le 25 mars dernier, l’Assemblée nationale togolaise a voté à l’initiative du président Faure Gnassingbé une nouvelle Constitution qui instaure un régime parlementaire, permettant aux députés d’élire le président de la République pour un mandat unique de six ans et un président du Conseil de ministres aux mains duquel est concentré l’essentiel du pouvoir politique pour une durée de six ans sans limitation de mandat.
Tournons La Page constate que cet acte sape les fondements de la démocratie et viole l’actuelle Constitution togolaise qui dispose en son article 59 que le mode d’élection du Président ne peut être modifié que par référendum. Cette démarche solitaire viole également le protocole additionnel de la CEDEAO relatif à la bonne gouvernance qui prescrit en son article 2 qu’aucune modification de la loi électorale ou de la Constitution ne peut se faire sans une large majorité des acteurs politiques dans les six mois précédant l’élection.
En outre, TLP souligne que cette décision risque de diviser profondément le pays et de générer des tensions significatives à court et moyen termes. Le silence de l'Union africaine et de la CEDEAO sur cette question est préoccupant, car ignorer cette dérive politique revient à être complice de l'affaiblissement de la démocratie non seulement au Togo, mais également dans toute l'Afrique.
Pour TLP, l'adoption de cette nouvelle Constitution perpétuerait les mauvaises pratiques en Afrique, entraînant de nombreuses violations des droits humains. Les manifestations de 2017, violemment réprimées et ayant entraîné la perte de vies humaines, témoignent de la volonté du peuple togolais de lutter pour une alternance démocratique.
Dans ce contexte, Tournons La Page réaffirme son engagement en faveur de la démocratie et lance un appel pressant aux autorités togolaises, aux partenaires et amis du Togo.
Tournons La Page appelle :
1. Les autorités togolaises :
- À mettre fin à cette initiative qui risque de plonger le Togo dans une incertitude aux lourdes conséquences pour les populations et tout le pays ;
- À ne pas promulguer cette nouvelle Constitution qui crée déjà de vives tensions et qui consacre un mépris à l’endroit du peuple togolais ;
- À préserver la Constitution modifiée en 2019 limitant le nombre de mandats à 2 et élisant le président de la République au suffrage universel direct pour un mandat de 5 ans ;
- À respecter le calendrier électoral conformément au décret n° 2024-018/PR du 23 février 2024 pris par le Président de la République, modifiant le décret n° 2024-011/PR du 08 février 2024 portant ouverture et clôture de la campagne électorale pour les élections législatives et régionales de 2024 ;
- À prendre des mesures idoines pour garantir la non-violence et la transparence des scrutins lors des prochaines élections législatives et régionales ;
- À s’abstenir de tout usage illégal des forces togolaises de sécurité qui ne ferait qu’aggraver un contexte socio-politique déjà volatile ;
- À lever les interdictions de rassemblements et de réunions pacifiques. Celles-ci violent le droit à la liberté de réunion pacifique et le droit à la liberté d’expression garantis par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, ratifiés par le Togo.
2. Les partenaires et amis du Togo :
- À se mobiliser aux cotés des Togolais pour barrer la route aux autorités togolaises qui viennent de s’engager dans une voie sans issue de confiscation de la démocratie, sanctionnée par le Protocole additionnel de la CEDEAO et de la Charte de l'Union Africaine sur la démocratie, les élections et la bonne gouvernance ;
- À soutenir les acteurs pro-démocratie et le peuple togolais dans la défense de la Constitution et dans la quête d’une société togolaise démocratique ;
- À dissuader les autorités togolaises dans cette entreprise unilatérale et dangereuse qui ne fait que compromettre les intérêts vitaux de la Nation togolaise.
Photo : Télécharger cette image sur : Flickr | Créateur : @ Emmanuel PITA